Pages

mardi 10 octobre 2023

Architecture de données, le nouveau cœur du système d’information ?

                                                                                                            Par Philippe Nieuwbourg

Pendant de nombreuses années en informatique la gouvernance de données n’était pas considérée comme un sujet majeur. On ne l’évoquait que dans des cas particuliers comme pour les grandes bases de données ou des systèmes d’information particulièrement complexes. Plus récemment on a commencé à s’intéresser à la gouvernance de données avec le développement des ERP et surtout avec le développement de l’Intelligence Artificielle, notamment le « machine learning ». En effet, la qualité des données est fondamentale pour paramétrer efficacement ces systèmes.

Depuis quelques années on a pris conscience que les données constituent une partie significative du patrimoine des entreprises et des administrations. Pour l’améliorer il est nécessaire qu’un travail de conception significatif soit effectué. Il ne doit pas être mis en œuvre application par application mais réalisé au niveau du système d’information de l’entreprise car la même donnée ou le même ensemble de données peuvent être produits et utilisés par différents systèmes.

L’importance croissante des architectes

Dans ces conditions, la définition des données mais aussi leur stockage et leur gestion deviennent des enjeux cruciaux. Il est pour cela nécessaire d’améliorer l’architecture des données et de disposer de la compétence de professionnels appelés architectes de données. C’est une profession qui monte. Une requête réalisée ces jours-ci sur LinkedIn montre que dans le monde 70.000 personnes s’identifient comme « Data Architect » et 604 s’identifient en français comme des « architectes de données ». Comme on le voit c’est une profession qui progresse.

Mais en informatique le terme architecte est ambigu. Il y a quelques mois, je donnais une formation sur le Big Data à la SNCF. Dans la salle, j’ai rencontré non pas un, ni deux, mais douze architectes… tous de la SNCF, tous arborant des titres différents, et ils ne se connaissaient pas les uns les autres. Accessoirement, aucun n’était vraiment chargé des données, alors même qu’ils venaient suivre une formation sur ce sujet.

Il existe en informatique de nombreux type d’architectes différents comme les architectes d’entreprise, les architectes d’application, les architectes fonctionnels, les architectes techniques, les architectes systèmes, les architectes réseaux et maintenant le petit nouveau qui commence à pointer le bout de son nez, l’architecte de données ou « Data Architect ». Au cours des cinq dernières années, selon Google Trends, les recherches sur Google concernant le terme “architecte de données”, ont bondi de plus de 30 %. Cela montre bien l’intérêt croissant pour la fonction.

Mise en perspective des évolutions de la fonction

Pendant les décennies de 1990 à 2010 où on a considérablement développé l’usage des ERP, l’application était reine et elle embarquait avec elle ses données. A cette époque l’essentiel des efforts portait sur le développement des fonctions mises en œuvre. Cependant, on a noté, dès cette époque, qu’une attention particulière était portée à la mise en commun de certaines données. Cette démarche a fait clairement apparaître la complexité du partage des données.

Ensuite on a assisté au développement des systèmes décisionnels (infocentre, data warehouse, data lake, …) et surtout il y a eu plus récemment le développement de l’emploi du cloud. Ils ont mis en évidence le rôle fondamental de la définition et de la gestion des données. Il est ainsi apparu peu à peu que leur place est au cœur même du système d’information. Mais surtout ces démarches ont montré, contrairement aux idées dominantes à cette époque, que les données doivent être indépendantes des applications qui les utilisent.

Dans ces conditions, il est probable que dans les années à venir, on va assister au développement rapide du métier d’architecte de données. Son rôle consiste à définir et à maintenir l’architecture de données, indépendamment des applications mais en relation avec elles. Il a la responsabilité de :

-        Échanger avec les métiers, les informaticiens et en particulier avec les « data scientists »,

-        Évaluer l’architecture de données en place et prévoir son évolution,

-        Concevoir une nouvelle architecture de données,

-        Planifier la mise en œuvre d’un modèle de données,

-        Estimer les coûts d’investissement et de fonctionnement,

-        Mettre en œuvre les meilleurs pratiques d’ETL (Extraction, Transformation, Chargement),

-        Surveiller les bases de données existantes, assurer leur sécurité et suggérer des mises à jour,

-        Contrôler la conformité des données,

-        Documenter l’architecture des données et la maintenir à jour,

-       

Comme on le voit, les tâches à accomplir sont nombreuses et variées. C’est une fonction délicate à accomplir car l’architecte, on le sait, conçoit mais il ne construit pas. En effet, la mise en œuvre est réalisée par d’autres.

C’est une fonction transverse qui impacte presque toutes les autres. Dans ces conditions ses interventions sont parfois perçues comme des perturbations, voir des agressions. Mais le fait de ne pas intervenir n’arrange pas une situation délicate ou compromise. En fait, c’est un problème de structure de l’entreprise.

En pratique on hésite en permanence entre une organisation centralisée ou un système de type fédéral. Dans ce dernier cas chacun intervient dans un cadre réglementé et négocié. On constate que depuis quelque temps le modèle fédéral tend à se développer et un certain nombre d’entreprises mettent en place des « Chief Data Officer ». Cependant, ce modèle a une limite car assez vite on risque de se heurter à la volonté d’autonomie naturelle des métiers avec les risques de balkanisation bien connus qui s’en suivent.

Les fonctions de l’architecte de données

La définition d’une architecture de données est le cœur de la démarche de gouvernance de données. Elle repose quelques points clés qu’il est important de mettre en œuvre :

-        Définir le rôle de l’architecture de données et sa place dans le système d’information,

-        Préciser la fonction de l’architecte de données : son profil, ses missions et son rattachement hiérarchique,

-        Organiser les relations entre les différents métiers d’architecte au sein de l’organisation et notamment en ce qui concerne la répartition des rôles, les relations avec les hiérarchies et le recouvrement des opérations,

-        Définir le schéma directeur de données (Data Framework), le modèle de données (Data Schema) et le cycle de vie des données (Data Lifecycle),

-        Prévoir le rôle de l’architecture de données afin de répondre aux besoins du Big Data,

-        Définir son rôle dans la gouvernance des systèmes d’information de l’entreprise et de manière plus générale dans la gouvernance de l’entreprise,

-       

Comme on le voit c’est une activité fondamentale pour l’avenir des systèmes d’information mais elle est parfois difficile à mettre en œuvre. A terme il est probable que cette démarche va évoluer vers le « Data Mesh ». Cette évolution est hâtée par le développement de l’Intelligence Artificielle et notamment l’apprentissage machine (Machine Learning). A terme, il est possible que on assiste à un découplage de l’architecture des données et de l’architecture applicative.

Ce texte est un résumé de la conférence que Philippe Nieuwbourg a fait au Club de la Gouvernance des Systèmes d’Information le Mardi 26 Septembre 2023 sur le thème : « Architecture de données, le nouveau cœur du système d’information ? ». Elle a permis de faire le point sur ce sujet et de répondre à quelques questions clés :

-        Qu’est-ce que l’architecture de données ?

-        Quel rôle assure l’architecte de données ?

-        Quelles relations entre l’architecte de données et les métiers ?

-        Quelles sont les évolutions probables de la fonction ?

-        ….

Lire ci-dessous le support de présentation de l’exposé de Philippe Nieuwbourg :

                                                                                                                                 Slide

1 – Définitions                                                                                                           2

2 – Rôle de l’architecte de données                                                                            6

3 – Quelques qualités sont nécessaires                                                                       7

4 – Intégrer l’architecture de données au cœur de l’équipe data                             10

5 – Comment ont évolué les modèles de gouvernance                                            16

6 – Choisir un modèle d’entreprise ; centralisé ou fédéral ?                                    17

7 – La balkanisation des données                                                                             20

8 – La place du Data Lake                                                                                        22

9 – Le Data Mesh                                                                                                     25

  

samedi 30 septembre 2023

Réussir la transformation numérique

Donner à l’ensemble des collaborateurs de l'entreprise une culture du numérique

                                                                                    Par Bernard Laur

 Malgré les affirmations souvent répétées, la transformation numérique des entreprises ne se fait pas dans la joie et l’allégresse. Un certain nombre de firmes rencontrent des déconvenues, des difficultés de mise en œuvre et même parfois des échecs.

 

Lorsque l’on cherche à comprendre ce qui s’est passé, on constate que différents facteurs expliquent ces « plantages » :

-        Un majorité des salariés se trouvant dans les différents métiers de l’entreprise n’ont pas la moindre idée sur ce que pourrait leur apporter le numérique. Ils utilisent quotidiennement l’informatique et en concluent que toutes ces technologies apportent plus de contraintes que de valeur. En vérité ils ont une culture technologique limitée.

-        Les équipes de recherche-développement chargées de concevoir les nouveaux produits et services marginalisent totalement la composante numérique de leurs projets. Très souvent ils ignorent les évolutions technologiques mais surtout ils sont sceptiques sur leurs impacts. Ce qui fait que les nouveaux produits ou les services sont dépassés dès leur sortie ou rapidement obsolètes.

-        De nombreux collaborateurs utilisent mal les outils informatiques disponibles. Ils ont une connaissance superficielle des fonctions proposées. Ceci fait qu’ils sous-utilisent ces outils. Pire, ils cherchent parfois à les contourner, gardent des procédures manuelles ou alourdissent inutilement leurs procédures.

-        Les travailleurs de première ligne ont été oubliés. L’essentiel des systèmes d’information concernent la gestion, le commercial, les ressources humaines mais ignorent les ateliers, la logistique, les itinérants, … Les ouvriers et les opérateurs (Front Line Workers)  ne disposent pas d’applications adaptées à leur activité. Pourtant ils ont des besoins de gestion, de suivi, d’assistance aux opérations, de contrôle, …

-        Face à l’évolution foisonnante et « brownienne » du secteur du numérique, les informaticiens n’arrivent pas à se tenir au courant des évolutions et innovations tant en ce qui concerne les technologies, les matériels que les logiciels. Ils ne connaissent que quelques/leurs systèmes et les environnements permettant de les mettre en œuvre, ce qui fait qu’ils ont du mal à sortir de ce qu’ils ont l’habitude d’utiliser. Ceci concerne l’informatique mais de manière plus générale les technologies et applications numériques.

-        L’encadrement, les membres des Codir et des Comex, les patrons de métiers sont totalement dépassés par les innovations informatiques et de manière plus générales par tous ces changements.

Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner des retards constatés en matière d’évolution, de prise en compte des innovations et des difficultés rencontrées dans les opérations de transformation numérique.

 La cause de ces blocages est due en grande partie au faible niveau de connaissance des technologies numériques et de leur évolution par le personnel de l’entreprise et particulièrement par les dirigeants, constaté dans de nombreuses entreprises notamment dans les activités de service et particulièrement dans l’industrie. Pour changer ces comportements il est nécessaire de faire évoluer la culture technique de l’entreprise. C’est un changement en profondeur. Il est pour cela conseillé de mettre en place une politique d’une certaine ampleur. C’est une stratégie concertée, continue, avec une vision à moyen terme de l’ordre de cinq ans au minimum. Il est pour cela nécessaire de :

  • -        S’assurer que les décideurs et les principaux responsables ont les bases techniques nécessaires pour comprendre les évolutions en cours et prendre les décisions liées.
  • -        Aider le personnel de l’entreprise à mieux utiliser les applications existantes et surtout connaître les possibilités qu’elles offrent.
  • -        Informer l’ensemble des salariés de l’entreprise des évolutions et innovations technologiques concernant leurs différents métiers.
  • -        Faire prendre conscience des possibilités exposées par les concurrents et des avancées des entreprises « best in class » au niveau mondial.

 Pour cela il est nécessaire de mettre en place une démarche de formation et d’organisation concernant l’ensemble de l’entreprise :

  • -        Elle commence par le coaching informatique de tous les dirigeants (ou  du moins ceux qui acceptent, mais les exceptions sont rares…). Ce sont le directeur général et tous les membres du comité de direction, et par extension les managers « métiers ».Il est nécessaire de voir chacun en tête à tête pendant le temps nécessaire pour lever tous les doutes et compléter leur niveau de connaissances du sujet. Généralement 8 séances de 2 heures chacune sont nécessaires. Au cours de ces entretiens, le coach assure une présentation « pédagogique » de ce que sont les technologies, les composants, les architectures du SI,… et fait une large part aux échanges informels. Tous les sujets sont abordés avec les « coachés » et il est nécessaire de répondre à toutes les questions qu’ils se posent … en toute confidentialité.
  • -        Mettre en place un dispositif de veille technologique de façon à suivre l’évolution du domaine numérique en général et à permettre de repérer les innovations concernant les différents métiers de l’entreprise. Cette veille se concrétise par des notes de synthèse mensuelles adaptées aux informaticiens d’une part et à chaque métier d’autre part. Ces informations sont diffusées par abonnement email, sur l’Intranet et accessibles à tous les collaborateurs et en particulier aux informaticiens. Une attention toute particulière doit être portée à la lisibilité des documents. L’objectif est de lutter contre l’illisibilité des documents produits qui est un mal commun aux métiers du numérique : c’est la démarche FLAC, c’est-dire « Facile A Lire et à Comprendre », qui impose des règles de rédaction, d’explicitation et de présentation (graphique) de l’information applicables à tous documents émis et diffusés par la DSI. Les notes mensuelles sont complétées par un document de synthèse trimestriel et/ou une visioconférence de courte durée (30 minutes) ouverte à tous à une heure de large disponibilité individuelle (13 heures 30 ?)  pour mettre le focus sur les points clés tout en les vulgarisant.
  • -        Organiser des opérations d’information et d’assistance à la demande dans les unités opérationnelles métiers, les services « tertiaires », les représentations régionales, ... Ces réunions doivent avoir lieu périodiquement de façon à répondre aux questions des salariés et (le cas échéant) de les alerter sur les innovations technologiques importantes les concernant.
  • -        Améliorer la maîtrise de « leur » informatique par les collaborateurs. Pour cela il faut créer des « workshops d’usage » courts (une heure) permettant d’améliorer l’utilisation des applications existantes en mettant l’accent sur une fonctionnalité, un process majoritairement méconnu des utilisateurs (les règles dans Outlook par exemple) que trop souvent les utilisateurs méconnaissent ou sous-emploient par ignorance, sans compter les cas de mauvais usages . Ces workshops ne remplacent en aucun cas la formation initiale qui reste incontournable : la formation initiale présente « ce que vous pouvez faire » avec un outil, et ensuite les workshops décrivent « ce que vous devez faire » pour être efficace.
  • -        Vérifier que la formation initiale sur les applications et le SI est toujours réalisée systématiquement et dans de bonnes conditions, en particulier pour les nouveaux embauchés. Passent-ils « sous le radar » ? Il faut absolument éviter la formation sur le tas et le bouche à oreille, à l’origine de la plupart des mésaventures ultérieures.
  • -        Compléter ces actions de formation par des « analyses d’usage »  réalisées par des professionnels expérimentés chargés de « regarder par-dessus l’épaule des utilisateurs » afin de détecter les mauvaises ou non productives utilisations des outils numériques, lesquelles sont souvent le résultat de défauts d’ergonomie et de conception des logiciels. Ces opérations permettent d’initier  les besoins d’adaptation des applications et des processus en se basant sur les difficultés rencontrées par les utilisateurs. Les investissements nécessaires, souvent  de maintenance logicielle, ont des ROI inférieurs à un an.
  • -        L’expérience montre que la marge d’amélioration de l’efficacité d’utilisation par les trois mesures ci-dessus (Formation initiale + workshops + amélioration de l’UX) est de l’ordre de 20 % à 40 % !
  • -        Enfin, - dernier point très important - il faut s’assurer que le dispositif d’assistance, de conseil et de service, le « call center », est bien disponible si nécessaire 24 h sur 24 et 7 jours sur 7, notamment dans le cas de multinationales et que les membres de ce service ont bien assimilé l’ensemble des actions, informations, formations décrites précédemment. Une personne ayant des difficultés ne doit en aucun cas rester seule avec son problème ou sa préoccupation. C’est un point fondamental et souvent délicat à mettre en pratique surtout lorsque ce service est sous-traité.

 Cette démarche est un processus progressif et qui ne fait apparaître ses gains qu’après un ou deux ans. Il doit s’intégrer dans un business model et mettre en œuvre une gouvernance adaptée. Bien entendu cette démarche à un coût, mais c’est le prix à payer pour rester dans la course à l’innovation numérique. C’est la loi des cinq : « 5 ans, 5 personnes pour 5.000 collaborateurs et un budget annuel de sous-traitance de 500.000 euros ». Sans cela les transformations numériques nécessaires seront d’une trop faible ampleur et elles interviendront trop tard.

 

C’est un résumé de la conférence de Bernard Laur faite au Club de la Gouvernance des Systèmes d’Information le Mercredi 31 Mai 2023 sur le thème : « Donner à l’ensemble des collaborateurs de l'entreprise une culture de base du numérique - La « e-culture » des collaborateurs, clef de la « e-transformation » de l’entreprise ». Elle a permis de faire le point sur ce sujet et de répondre aux questions clés :

-        Comment rendre efficace et efficiente la transformation numérique des entreprises ?

-        De quelle manière permettre aux entreprises de saisir les opportunités liées aux évolutions et innovations technologiques ?

-        Comment changer l’attitude des salariés de l’entreprise face aux changements technologiques ?

-        Quels dispositifs adopter pour faire évoluer leur culture ?

-        ….

Lire ci-dessous le support de présentation de l’exposé de Bernard Laur :

                                                                                                                                 Slide

1 – Le constat                                                                                                2

2 – La solution                                                                                                4

3 – Quelle est la situation ?                                                                             6

4 – Coaching SI                                                                                              8

5 – Veille IT                                                                                                  10

6 – Workshops « Usage »                                                                             11

7 – Contrôle Design et performance                                                             13

8 – En résumé                                                                       

vendredi 31 mars 2023

Voir clair dans la notion de gouvernance : un exercice de gouvernance comparée

par Philippe Nieuwbourg

Le concept de gouvernance est un terme à la mode. On a tendance à le mettre à toutes les sauces. Cependant, selon la personne qui l’emploi, on s’aperçoit que sous le même terme les idées et les pratiques sont assez différentes.

 Le terme de gouvernance peut s’appliquer à de très nombreux domaines. On est ainsi amené à considérer :

-        la gouvernance de l'entreprise,

-        la gouvernance du système d'affaires (le business model),

-        la gouvernance du système opératoire,

-        la gouvernance des systèmes d'information,

-        la gouvernance des données,

-        la gouvernance de l'information,

-        la gouvernance de la sécurité,

-        ….

Comme on le voit, le terme de gouvernance semble s’appliquer à de nombreux domaines et peut être conjugué à tous les temps. Mais sait-on vraiment de quoi on parle ? Pour éviter des incompréhensions, voire des dérives, il est nécessaire de clarifier le concept.

 Il est pour cela nécessaire de développer une sorte de « gouvernance comparée » comme l’a suggéré Alain Sacquet de la même manière qu’il existe dans le domaine de législation une discipline du droit comparé. Elle analyse les différentes solutions juridiques que les différents pays ont trouvé pour traiter des problèmes analogues.

 Dans le cas de la gouvernance l’objectif est de permettre de mieux comprendre les similitudes et les différences entre les différentes approches possibles afin d’identifier les types de gouvernance et de dégager les évolutions tendancielles.

 Il est pour cela nécessaire de dresser un état de l'art. Dans ce cas les universitaires utilisent le terme de "revue de la littérature". Cette approche permet d’identifier les différents usages du terme de gouvernance. Cela permet de comprendre la variété des situations et les évolutions en cours.

 Parmi les différentes gouvernances il y a d’abord celle des Etats. C’est la manière de diriger efficacement un pays. C’est un domaine vaste et complexe et l’observation montre que la marge de progrès est encore importante dans ce domaine. Il y a ensuite la gouvernance d’entreprises ou « corporate governance » qui est la manière de les organiser afin de mettre en œuvre la stratégie choisie. C’est un domaine où il y a eu beaucoup de réflexion depuis une trentaine d’années. Elle se décline en divers gouvernance : financière, risques, ressources humaines, informatique, … Ce sont des efforts importants qui se traduisent par des dépenses significatives car les enjeux sont conséquents. Il est donc nécessaire d’avoir une démarche de gouvernance efficace. C’est le but de la démarche de gouvernance comparée.

 Lorsqu’on analyse notre domaine plusieurs démarches sont possibles :

-        la gouvernance des systèmes d’information,

-        la gouvernance informatique,

-        la gouvernance des données,

-        la gouvernance des informations,

-        la gouvernance des projets,

-        la gouvernance de la sécurité,

-        ….

Ce ne sont pas tout à fait les mêmes démarches car ce ne sont pas les mêmes domaines ni les mêmes enjeux. Un travail de définition est nécessaire et le Club Européen de la Gouvernance des Systèmes d’Information y a largement contribué et va continuer de le faire dans les années à venir. Il existe dans ces domaines une marge de progrès importante.

L’analyse linguistique de ces différents termes faite à l’aide des outils mis à disposition par Google sur la masse des données recensées sur le Web permet d’évaluer les termes les plus proches de la gouvernance. Ce sont la conformité (compliance en anglais), le management, les risques, la sécurité, la qualité et l’audit (ce terme se retrouve surtout dans le corpus anglo-saxon).

Autre tendance significative dégagée par Google Trends : le terme gouvernance des données est de plus en plus utilisé avec le terme : « Chief Data Officer ». A l’inverse on constate une érosion régulière dans le temps du terme « gouvernance IT ».

La conférence de Philippe Nieuwbourg faite dans le cadre du Club de la Gouvernance des Systèmes d’Information le Mercredi 8 Mars 2023 sur le thème : :« Voir clair dans la notion de gouvernance : un exercice de gouvernance comparée » a permis de faire avancer la réflexion sur la gouvernance comparée. Cette démarche ne fait que commencer et elle doit être continuée. Il est pour cela nécessaire de réaliser un véritable travail de recensement permettant d’identifier :

  •       les différents type de gouvernances existantes,
  •      leurs définitions respectives,
  •       les livres ou les documents de référence qui les explicitent,
  •        le rôle des diverses acceptions du terme gouvernance dans un monde en perpétuel changement,
  •        le positionnement de ces différentes notions les unes par rapport aux autres grâce à un diagramme de comparaison.

Ce travail est en cours et doit être continué.

 Lire ci-dessous le support de présentation de l’exposé de Philippe Nieuwbourg :

                                                                                                                                 Slide

1 – Un peu d’IA générative avec Dalle-E                                                       2

2 – Point de départ : « l’idée d’une gouvernance comparée »                       9

3 – La gouvernance des Etats                                                                       12

4 - …et la gouvernance des entreprises                                                        14

5 – De multiples « gouvernance » dans l’entreprise                                     17

6 – Le budget de la gouvernance d’entreprise                                              19

7 – Les gouvernances dans « nos » domaines                                              22

8 – Analyse des mots les plus employés                                                       30

9 – Les tendances                                                                                         32

10 – Quelles limites donner à la gouvernance ?                                           35