D’après la présentation faite par Christine Debray
Au cours des soixante
dernières années l’informatique s’est considérablement développée et les
progrès réalisés ont été très importants. Ils ont permis d‘optimiser la
gestion des entreprises, d’accélérer les échanges de biens et de services, de développer
les communications, … Le numérique est devenu partie importante de nos vies. C’est
aujourd’hui la solution à de très nombreux problèmes qui, jusqu’alors
freinaient le développement de nos sociétés. Mais, la partie négative de ce
processus ne doit pas être oubliée. On a ainsi constaté l’accroissement de la
pression écologique qui est trop souvent sous-évaluée.
Les faits sont têtus
Les émissions de gaz à effet de serre liées au numérique étaient estimées en 2020 à 3 à 4 % du total des émissions mondiales. En France elles sont un peu inférieures (2,5 %) mais on estime qu’elles vont croitre et être multipliées par 3 à l’horizon 2050. Quant à la consommation électrique du numérique en France, elle était estimée à 10 % de la consommation française en 2020, mais pourrait augmenter de 80% en 2050.
On pense, bien entendu, aux considérables
consommations électriques des centres de traitement. Il y en a 5.000 dans le
monde et la moitié appartiennent aux GAFAM. Mais, en réalité, ils ne
représentent (en France) que 16 % de l’empreinte carbone associé au numérique.
A cela on peut leur associer les consommations des réseaux qui sont de l’ordre
de 5 %. C’est, en fait, la plus petite partie des pollutions constatées. Les 79
% restant sont dues aux terminaux : smartphones, PC, tablettes,
imprimantes, écrans, … C’est considérable.
Cette pollution n’est pas tant dû à la
consommation électrique ni à l’entretien de ces équipements mais à leur
fabrication qui représente près de 80 % de leur empreinte carbone. De plus le
nombre de ces équipements est considérable. On évalue qu’il y a 34 milliards
d’objets en fonctionnement dans le monde soit plus de 4 par habitant de cette
planète ou, autrement présenter 15 équipements par ménage.
Or, pour les fabriquer il est
nécessaire d’utiliser de nombreux minerais et terres rares. Leur extraction et
leur raffinage se traduisent par des pollutions graves et irrémédiables. Ainsi,
pour produire un portable pesant 2 kilos il faut extraire 800 kilos de minerais
et de matières premières, sans compter l’eau, l’énergie et les produits
chimiques nécessaires pour les raffiner.
Pour limiter cette dérive, il est
nécessaire de définir une stratégie. Elle se résume par les 3 R : Réduire
la consommation, Réutiliser les équipements et Recycler les
matériaux.
Dans le monde, seulement 20% des
matériels numériques sont collectés pour, soit être recyclés, soit leur donner
une deuxième vie. Il est toujours préférable de prolonger la vie d’un matériel
en leur reconditionnant et lui offrant une seconde vie sur un marché de seconde
main. En effet, le recyclage des matériels est consommateur en énergie et en
autres ressources et très peu de matières peuvent être correctement recyclées. Pour
faire naitre un secteur du recyclage et du reconditionnement en France, un
appel à projet a été ouvert par l’Etat sur 2023 et 2024.
Une affaire de gouvernance
Dans ces conditions il faut réagir, dans le secteur numérique comme dans tous les autres secteurs. L’Etat a mis en place un Secrétariat Général à la Planification Ecologique en juillet 2022, rattaché aux services du premier ministre pour :
-
Aller plus vite et plus loin en matière d’écologie,
-
Mieux coordonner les actions,
-
Adapter les choix aux réalités locales et individuelles,
-
Envisager la transition écologique comme source de
nouvelles opportunités.
En janvier 2023, un plan et une
feuille de route ont été établis dont les points clés concernent :
-
Mieux se déplacer,
-
Mieux se loger,
-
Mieux préserver et valoriser nos écosystèmes,
-
Mieux produire,
-
Mieux se nourrir,
-
Mieux consommer.
En décembre 2023 est sortie la feuille
de route « numérique et données » pour aider par le numérique à la
réalisation de la feuille de route de la transition écologique.
De plus, pour limiter l’empreinte
écologique des administrations d’état, une mission interministérielle a été
mise en place dans la DSI groupe de l’état : la MINUM-ECO pour coordonner les
actions des ministères pour un numérique plus sobre. Un reporting est établi deux
fois par an celui-ci et permettra de suivre les progrès réalisés. Chaque Ministère
est concerné. A la Culture cela s’est traduit par la définition de 39 actions
dont une partie concerne le numérique et en quelques mois 21 ont déjà été mises
en place. A terme 60 actions sont prévues.
Les quatre leviers recommandés par
l’ADEME pour un numérique sobre sont :
-
La stabilisation du parc des terminaux,
-
L’augmentation de la durée de vie des équipements en
veillant de les choisir en fonction de leur réparabilité,
-
La conception des équipements de façon à avoir des
matériels plus efficaces et moins consommateurs d’énergie,
-
L’encouragement de la sobriété des usages et en veillant
à appliquer les bonnes pratiques de conception et de consommation des services
numériques.
Ces leviers concernent l’ensemble des
secteurs économiques. Le secteur culturel, pris au sens large, occupe près de
70% de la bande passante d’Internet. Bien entendu, une bonne partie correspond
plus à du divertissement qu’à de la culture. Mais cela va évoluer car dans les
années à venir car on prévoit que le numérique va être tiré par la culture qui
est un remarquable vendeur d’imaginaire. C'est un
enjeu considérable car les impacts écologiques du numérique sont
importants. Ceci fait que la sobriété numérique est au cœur de la gouvernance
numérique. Pour y arriver des changements de posture vont être nécessaire afin
de réussir à mettre en œuvre un numérique durable.
Après avoir travaillé pendant 40 ans en
informatique, notamment comme DSI, Christine Debray est aujourd’hui chargée de mettre
en place la sobriété numérique au sein du ministère de la Culture
Ce texte
est un résumé de la conférence faite par Christine Debray au Club de la
Gouvernance des Systèmes d’Information le Mercredi 20 Mars 2024 sur le thème : « La sobriété
numérique est au cœur de la gouvernance numérique ». Elle a
permis de faire le point sur ce sujet et de répondre à quelques questions clés comme
:
-
Quelle est la situation du
secteur du numérique face à la montée des préoccupations écologique ?
-
Quelles sont les activités
du numérique les plus polluantes ?
-
Où se situent les enjeux principaux et
les risques majeurs ?
-
Comment améliorer les
performances écologiques du numérique ?
-
Que fait l’Etat ?
Quelle stratégie écologique met-il en œuvre ?
-
Dans ce contexte quel est le
rôle de la culture ? Pour quelles raisons c’est un secteur clé ?
-
De quelle manière le secteur
privé peut contribuer à améliorer la performance écologique du numérique ?
-
….
Lire ci-dessous le support de présentation de l’exposé de Christine Debray :
Slide
1
– Introduction 3
2
– Les autres impacts écologiques 7
3
– Les impacts du numérique 11
4
– Les gaz à effet de serre du numérique 12
5
– L’empreinte carbone des centres de traitement, des réseaux
et des terminaux 18
6
– Le poids de la fabrication des terminaux 19
7
– Le poids de l’extraction minière 21
8
– L’importance des déchets et leur faible recyclage 23
9
- La gouvernance à mettre en place 27
10
– La planification écologique 30
11
– La gouvernance écologique au Ministère de la Culture 34
12
– Les principaux leviers d’action 35
13
– Le poids du streaming vidéo 37
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